“Les données personnelles, c’est comme le dentifrice : une fois sorti, impossible de le remettre dans le tube.” Voilà un adage du 21e siècle qui s’applique parfaitement à notre histoire du jour. Dernièrement, le suspense autour des activités de l’Agence de Sécurité Nationale américaine (NSA) était digne d’un thriller de bas étage : achat de données de navigation web des Américains sans mandat, actes dignes d’un James Bond en pleine crise identitaire. Le sénateur Ron Wyden (D-OR), qui a bloqué la nomination du nouveau directeur en l’absence de réponses claires, a fini par obtenir la confession tant attendue. Oui, la NSA achète bien ces données, sans passer par la case justice.
Le directeur sortant, Paul Nakasone, a confirmé dans une lettre datée du 11 décembre que son agence fait son petit marché chez les courtiers de données. Cependant, il précise que ces achats s’effectuent dans le cadre de missions autorisées, allant de la cybersécurité à la collecte de renseignements étrangers. Pas de panique donc, votre localisation GPS n’est utilisée qu’en dehors des États-Unis, sauf cas exceptionnels (oups !).
Vos données comme dentifrice : indélogeables une fois sur la toile !
Ce n’est pas sans une certaine délicatesse que la NSA évoque l’utilisation « modérée » de ces données délicieusement privées, tout en soulignant leur valeur incontestable pour la sécurité nationale. Des filtres techniques seraient même utilisés pour minimiser la collecte d’informations personnelles des Américains. La question se pose : si ces filtres étaient des chaussettes, garderaient-ils nos pieds au sec ?
Wyden, pour sa part, ne semble pas convaincu de la légalité de ces pratiques. Acheter des données, c’est comme acquérir une voiture sans permis : on sait que ça va mal finir. Du côté de la commission fédérale du commerce (FTC), on punit un courtier véreux pour avoir vendu des données de localisation. Cette information, vendue y compris à des contractants gouvernementaux, pourrait mener droit à des cliniques médicales, des lieux de culte ou même des centres pour victimes de violences domestiques. Autant dire qu’on n’est pas sorti de la bergerie avec un tel loup dans le coin.
Wyden ne lâche pas le morceau et demande un grand ménage de printemps : que toutes les agences de renseignement fassent l’inventaire des données personnelles achetées à l’insu des consommateurs et qu’elles suppriment ce qui est contraire aux normes de la FTC. Un pas de plus vers l’utopie de la transparence ou un vieux rêve de journaliste aux yeux étoilés ?
C’est dans cette ambiance d’espionnage décontracté que l’on en arrive à notre conclusion. Si le shopping de données personnelles était un sport olympique, sans doute la NSA et ses comparses médailles d’or seraient-ils. Et pour se couvrir, rien de tel qu’une bonne vieille rhétorique de protection nationale — car en fin de compte, dans la valse des données, c’est toujours le citoyen qui se retrouve le pied écrasé. Mais n’oublions jamais : les apparences peuvent être trompeuses, surtout quand il s’agit de nos précieuses et insaisissables données personnelles. Comme on dit, quand on navigue sur le web, on est tous dans le même bateau… jusqu’à ce que quelqu’un commence à vendre les rames!
Source : Engadget