« L’internet, c’est comme le Far West. Hier terre de liberté sans la moindre entrave, aujourd’hui c’est le grand shérif de l’Union Européenne qui fait régner la loi. D’accord, l’analogie est un peu forcée, mais l’essentiel est là ! »
Grâce à la nouvelle Loi sur les Services Numériques (DSA), l’UE permet aux utilisateurs de Facebook, Instagram, TikTok et Snapchat de dire “non merci” au bombardement incessant de contenu “personnalisé”. Vous savez, ces flux de contenu (!) qui semblent lire dans vos pensées grâce à une sorte de “techno-télépathie”. Ce choix de refuser la personnalisation basée sur le suivi de nos activités en ligne s’applique aux principales plateformes de l’UE, bien que certaines l’appliquent déjà au niveau mondial pour rationnaliser leur conformité.
Facebook a même anticipé le coup en lançant un nouvel onglet Flux présentant les posts de vos amis par ordre chronologique. Qui l’eut cru ? Le bon vieux temps où le contenu était aussi frais que votre baguette matinale. Et cela, sans une once de publicité basée sur le suivi d’activité. On parie que sans la DSA, Meta n’aurait jamais accédé à ces métamorphoses. Bon vent, Big Brother !
« L’UE dépose le marteau sur le Big Brother numérique, permettant aux utilisateurs de Facebook, Instagram, TikTok et Snapchat de refuser le contenu “personnalisé”. »
Mais refusons-nous vraiment quelque chose de valable ? Pourquoi ce choix de désactivation des recommandations de contenu basées sur le profilage est-il si important ? Les réseaux sociaux tirent leur pouvoir de leur capacité à capter toute notre attention, à nous garder à l’intérieur de leurs remparts numériques en jouant la carte de l’asymétrie informationnelle. Jetons un œil à ce système de recommandations basées sur le suivi. Il n’a pas besoin d’être très sophistiqué – au contraire, il peut se montrer grossier. Prenons mon cas : ai-je regardé une vidéo de chat sur Instagram ? Hop, mon fil d’accueil est envahi de petits félins avec le bout de la queue qui remue. C’est ce qu’on appelle ne pas voir le bout de la queue…
Actuellement, il est possible de nager sans heurter un chat dans ce grand océan digital qu’est Instagram ! Bien sûr, le fil “Pour vous” reste un safari de félins, mais je peux désormais choisir de voir uniquement les posts des comptes que je suis. Je peux enfin naviguer à ma guise, loin des suggestions de l’IA. Fini la marée de contenus sélectionnés dans le but de faire main basse sur mon attention.
L’histoire ne s’arrête pas là. Le nouvel environnement numérique fait ressembler la plateforme à Facebook d’antan où la simple pensée de vos amis pouvait réellement captiver votre attention. Une fois que vous basculez sur le nouveau feed chronologique de Facebook, vos amis ayant des posts généralement occultés par l’algorithme prennent soudainement leur revanche. Le pouvoir d’un fil d’actualité rassemblant les pensées non filtrées des amis ne doit pas être sous-estimé. C’est peut-être la révolution du contenu dont nos sociétés hyper polarisées ont véritablement besoin.
Pour conclure, s’affranchir de l’IA de TikTok nécessitera un peu d’initiative personnelle, car le règlement n’exige que les plateformes proposent une alternative non basée sur le profilage. Les effets de l’accroissement de l’autonomie des utilisateurs sur les plateformes traditionnelles ne conduiront peut-être pas à un changement radical immédiat. Cela dit, nous devrions célébrer notre nouvelle capacité à débrancher tranquillement leurs algorithmes. Si l’on réfléchit bien, le tombereau de contenus pseudo-personnalisés semblait être un cadeau empoisonné. Mais maintenant, nous avons la clé pour échapper à leur pouvoir d’attraction. Ce pourrait être la prochaine grande tendance… mais ne vous attendez pas à ce que celle-ci devienne virale.
Source : Techcrunch